C’est fou quand on y pense à l’absence de considération de la femme dès lors qu’elle annonce par ses mots ou par sa silhouette qu’elle est enceinte. Sous prétexte de s’intéresser au déroulement de la grossesse ainsi qu’au futur enfant, notre entourage et le grand public semblent oublier que la femme enceinte est d’abord une personne, puis une femme avant d’être le ventre qui abrite un futur être humain. Alors que tous, et à raison, combattent les formules touchant au harcèlement et au propos irrespectueux envers les femmes, beaucoup oublient toute pudeur face à une femme enceinte. Notre pudeur, leur respect, des formules à revoir et à méditer dans les propos du quotidien.
Ma conception n’est pas ton concept
C’est bien souvent comme ça que les propos des autres commencent à devenir insupportables. Et dire qu’on est partie pour neuf mois…
Tu es encore enceinte ? – Tu es sûre de vouloir un enfant ? – Ou d’en vouloir un autre ?
Et voilà, sous prétexte de notre bonne éducation et de la bienséance qu’on nous a enseignée, voilà qu’on se met à se justifier (soi et le géniteur) sur un choix qu’on a déjà ressassé parfois pendant longtemps ou sur une opportunité qu’on espérait depuis des années.
Et bien oui, je suis enceinte parce que je veux être mère et/ou avoir un autre enfant.
Depuis que la contraception existe et que l’avortement est légal toute femme fertile a (enfin) le choix de porter ou non un enfant. Ce choix lui appartient, elle n’a pas à le justifier devant qui que ce soit d’autre que le père, ni à son employeur, ni à sa famille, ses amies ou ses collègues.
Passons alors sur ce que les autres entendent dans notre dos, que l’on fait un enfant pour ne plus travailler, pour le congé maternité, les allocations familiales voire la retraite. Si on a la chance de ne pas les entendre sur le coup, ces ragots, c’est certain qu’il y aura bien quelqu’un pour nous les rapporter un jour ou pour les reporter sur d’autres femmes enceintes. C’est moche, c’est justement parfois l’amie qu’on aurait voulu comme marraine…
Ma sexualité n’est pas publique
A moins d’être une star du X, et même en ce cas, la fréquence des rapports sexuels, la difficulté à être féconde ou fécondée ne regarde personne d’autre que les acteurs et éventuellement le corps médical.
Les personnes qui veulent à tout prix savoir combien de fois et combien de temps on a ‘essayé’, si on est enceinte grâce à un programme spécifique, une FIV, une PMA ou totalement naturellement veulent-elles aussi savoir d’autres détails comme la position, la lingerie que l’on portait (ou pas) et si on s’était fait le maillot avant ?
Le témoignage sur les réseaux sociaux, les forums ou autre, des éventuelles difficultés qu’on a rencontrées et des solutions qui ont été trouvées est un acte généreux qui a pour but d’aider d’autres couples dans la même situation ; mais entre témoigner quand on le désire et répondre aux inquisitions sur notre intimité, il y a une marge.
La femme enceinte, la future mère et la mère qu’elle sera parlera de ce qu’elle veut quand elle l’aura décidé et avec qui elle aura choisi pour faire ses confidences.
Et puis, est-ce généreux pour l’enfant à naître de commencer à exposer l’origine de son identité bien avant qu’il en ait une ?
Je n’ai pas besoin d’avoir peur
Allez, soyons honnêtes, non, nous ne sommes pas rassurées surtout à notre première grossesse. Mais nous entendre raconter sans cesse les mêmes mésaventures de certaines grossesses et accouchements, on n’en a pas besoin ; bien au contraire.
Oui, le ventre s’arrondit, le corps de la femme évolue au fur et à mesure de la gestation ; mais non ce n’est pas pour ça qu’on ne sera plus féminine une fois enceinte et après l’accouchement. On peut s’habiller sans se ruiner confortablement et élégamment quand on est enceinte, on peut prendre soin de soi, prévenir pas mal et guérir beaucoup des conséquences de la maternité depuis les petits maux jusqu’à l’épisiotomie en passant par les vergetures et l’allaitement éventuel qu’on peut choisir ou refuser en toute liberté.
Même si un accident est toujours probable, on peut faire confiance aux professionnels de l’obstétrique qu’ils exercent en maternité ou en maison de naissance. On croît à la péridurale, à l’accouchement par voie naturelle même avec une présentation par le siège, on sait que l’hypnose peut nous accompagner, que l’haptonomie fait du bien au couple et au fœtus… Alors les peurs, les mauvaises expériences et les ragots, nous n’en voulons pas.
Je veux une grossesse sereine.
Ceux qui m’aiment doivent m’accompagner en ce sens.
Tous doivent respecter la femme d’abord et celle qui a choisi d’enfanter.
Brigitte C.M